Paris au printemps. La destination rêvée pour les amoureux et les groupes de touristes ultra motivés qui réussissent à visiter quatre capitales européennes en cinq jours (j’exagère à peine). Point commun entre eux : l’appareil photo armé d’une perche-à-selfie (ou selfie-stick pour nos cousins anglo saxons). L’objet ressemble à une canne à pêche et permet de s’immortaliser devant monuments, points de vue à haut coefficient romantique (au hasard, le pont des Arts et ses cadenas qui manquent de faire tomber les rambardes sur les passagers des bateaux mouches qui, sous peu, devront se munir d’un casque intégral pour une promenade sur la Seine) ou encore vitrine authentiquement luxueuse du faubourg saint Honoré ou de l’avenue Montaigne.
Il est amusant d’observer ces esthètes de l’autoportrait souvenir. Absorbés comme ils le sont par leur outil, ils passent la majeure partie de leur temps à bidouiller la perche (because le téléphone coincé dedans a glissé ou n’est plus connecté au bitonio qui déclenche la photo, quand ce n’est pas le manche rétractable qui fait des siennes…) tout en marchant pour ne pas ralentir le flux humain et, bien évidemment, ne rien apprécier du site sur lequel ils se trouvent. C’est ainsi qu’un jeune couple a traversé l’intégralité de la galerie des glaces à Versailles en essayant vainement de comprendre pourquoi LE selfie qu’ils avaient attendu d’y faire depuis deux bonnes heures (temps d’attente moyen à l’entrée du château) était désespérément flou. Quand le mystère a été éclairci, ils étaient à l’autre bout de la galerie, bien incapables de remonter le courant sous peine de lynchage en règle…
L’appendice est heureusement interdit d’accès dans certains musées comme le Louvre pour cause de risque de défiguration de tableau : ne manquerait plus que l’on porte atteinte au sourire de Mona Lisa 🙁